Les démocrates rêvent d'être les rois du Sénat
Trente-cinq sièges, sur les 100 que compte le Sénat américain, sont remis en jeu le 4 novembre. A l'issue du scrutin, les républicains pourraient bien voir leur rôle d'opposants réduit à sa plus simple expression.
Les démocrates pourraient se retrouver avec tous les atouts en main au Sénat. C'est loin d'être encore fait, mais ils se sont fixé comme objectif le chiffre magique de 60 sénateurs, une majorité qui empêche tout recours à la procédure d'obstruction dite filibuster. Les résultats des sénatoriales dans quelques Etats, le 4 novembre, pourraient leur permettre d'étoffer la petite majorité qu'ils détiennent pour le moment et franchir ce seuil, ce qui constituerait une première en trente ans pour les démocrates. Pour leur part, les républicains n'ont pas détenu une majorité pareille depuis 1911. Si les démocrates conservent également leur majorité à la Chambre des représentants, ce qui est pratiquement assuré, et remportent la présidence, ils concentreront le pouvoir à un degré jamais vu depuis la présidence du démocrate Lyndon Johnson, en 1965.
Le filibuster est une arme originale mais puissante. Elle permet à 41 sénateurs, sur les 100 que compte cette assemblée, de bloquer le processus d'adoption d'une loi. Si les démocrates remportent la Maison-Blanche, le filibuster serait le dernier pouvoir institutionnel qui resterait au Parti républicain. Voilà pourquoi ses membres se sont récemment mis à faire campagne sur les dangers d'un pouvoir politique sans contre-pouvoir. Les démocrates détiennent actuellement une majorité de 51 voix au Sénat. Plusieurs observateurs estiment que les démocrates peuvent gagner de six à neuf sièges. Mitch McConnell, du Kentucky, le chef du groupe républicain au Sénat, et Saxby Chambliss, de Géorgie, pourraient perdre leur siège si les électeurs se déplacent en masse le jour du scrutin pour chasser les candidats sortants dans les Etats républicains. C'est sans doute l'aspect le plus surprenant dans ces élections sénatoriales : les démocrates sont sur le point de rafler des sièges dans le Sud, bastion républicain depuis la présidence de Ronald Reagan. "Je ne pense pas que les républicains vont perdre dans le Kentucky ou en Géorgie, mais je ne parierai pas grand-chose là-dessus au train où vont les choses", confie Larry Sabato, qui dirige le Centre de science politique de l'université de Virginie. "Ça va être un raz-de-marée pour les démocrates. Ils vont faire très fort", ajoute-t-il.
Mais même si les démocrates obtiennent cette majorité ou une majorité suffisante pour attirer certains républicains modérés afin de parvenir à 60 voix sur certaines questions, ils ne seront pas à l'abri des difficultés. Leur majorité actuelle repose sur deux sénateurs indépendants, Joe Lieberman, du Connecticut, et Bernie Sanders, du Vermont. Les démocrates peuvent compter sur Sanders mais Lieberman, qui a rompu avec le parti à propos de l'Irak et a été battu lors des primaires démocrates aux élections sénatoriales de 2006, fait campagne pour John McCain. Ce n'est pas le grand amour entre les démocrates et Lieberman. De plus, certains des nouveaux sénateurs démocrates potentiels prendraient la place de républicains modérés. Or ces démocrates penchent à droite et seront peut-être enclins à rompre les rangs. Parmi eux, on recense quelques conservateurs comme Ronnie Musgrove, dans le Mississippi, Mark Warner, en Virginie, qui fait une campagne de modéré, et Kay Hagan.
Carolyn Lochhead
San Francisco Chronicle