Le journal Golfe Info suspendu et condamné à une amende

 

Reporters sans frontières dénonce la décision de la justice togolaise, le 16 décembre 2009, de condamner le trihebdomadaire Golfe Info à verser à l’Agence nationale de renseignement (ANR) la somme record de 80 millions de francs CFA (environ 120 000 euros). Accusé de "diffamation", le journal est en outre suspendu pour une durée de deux mois.

"Comment expliquer qu’une amende aussi exorbitante et contraire à la loi soit infligée à un journal indépendant ? Cette décision, sans précédent au Togo, met tout simplement en péril la survie du journal et ne doit pas faire jurisprudence. Les autorités devraient d’abord apporter davantage de preuves de la culpabilité de Golfe Info puis, si la diffamation est avérée, prononcer une peine moins lourde et plus juste", a déclaré l’organisation.

Le 16 décembre, le tribunal de première instance de Lomé a non seulement condamné le journal à dédommager l’ANR à hauteur de 80 millions de francs CFA, mais il lui a également demandé de verser 1 500 000 francs CFA (environ 2 300 euros) au titre de la commission du délit. S’estimant diffamée, l’ANR réclamait le paiement de 100 millions de francs CFA de dommages et intérêts, tandis que le ministère public n’avait requis que le paiement d’une amende de 1 500 000 francs CFA et une suspension de parution.

Le directeur de publication de Golfe Info, Kouavani Sodji, a dénoncé une "décision politique" et a affirmé sa volonté de faire appel.

Interrogé par Reporters sans frontières, un avocat du barreau de Lomé a déclaré : "Cette peine est exagérée, les journaux togolais n’ont pas ces moyens. Une amende de 1 500 000 francs et une suspension de parution auraient largement suffi".

L’ANR reprochait au journal de l’avoir citée comme source, dans un article publié le 30 septembre dernier, dans une affaire de trafic de drogue impliquant Mey Gnassingbé, chargé de mission à la présidence de la République et demi-frère du chef de l’Etat, Faure Gnassingbé. Cette affaire avait commencé avec l’interpellation, à l’aéroport de Lomé, d’Eugène Attigan, animateur de la télévision publique TVT, qui transportait de la cocaïne dans ses bagages. Suite à l’audition de ce journaliste par les renseignements, Golfe Info avait écrit : "Une chose est sûre, indique la même source proche de l’ANR, l’inculpé aurait affirmé être en mission pour Mey Gnassingbé". Le journal soutenait ensuite que la famille Gnassingbé était souvent citée dans des affaires de drogue.

Depuis 2004, la loi togolaise ne prévoit pas d’amende supérieure à cinq millions de francs CFA, même en cas d’"offense au chef de l’Etat". RSF



19/12/2009
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