Cantines scolaires : A Bakon, le directeur trafiquait les vivres
Juin 2010. Des élèves de l'école primaire publique de Bakon dans la province du Noumbiel font le siège de la circonscription de l'Enseignement de base de Batié. Venus pour y subir les examens de fin d'année, ils ont dû abandonner leurs cartables, le temps d'une marche de protestation contre leurs mauvaises conditions de vie dues à l'incurie de leur directeur. Le pécule qu'il a collecté auprès des parents d'élèves pour leur prise en charge avait été purement et simplement détourné. Mais ce n'était pas le seul forfait. L'enseignant détournait aussi les vivres de la cantine scolaire.
Ils étaient 17, les candidats à la recherche du parchemin de fin de cycle primaire (CEP et entrée en 6e) à avoir quitté Bakon pour se rendre à Batié. Leur village n'étant pas un centre d'examen, ils ont dû faire le déplacement de Batié, le chef-lieu de la province du Noumbiel, à l'instar des autres écoles dans la même situation. Pour le séjour dans la capitale provinciale, il leur a été demandé une contribution de 1000FCFA par candidat dans le cadre de leur prise en charge. A leur départ de Bakon, les maîtres qui les accompagnaient n'ont rien reçu de leur directeur comme à l'accoutumée pour la prise en charge des élèves candidats. Face à cette situation, ces derniers ont décidé de réagir par une marche dite de protestation sur les locaux de la circonscription d'Enseignement de Base (CEB) de Batié. Monsieur Da Emmanuel, l'inspecteur chef de la CEB, se serait volontiers passé de cette visite pour le moins embarrassante, lui qui ne s'attendait pas à pareille mésaventure. Malgré tout, sa réaction a été très prompte. Il enjoignit le directeur d'école, le sieur Célestin Somé, de restituer la somme détournée. Devant la tournure inattendue des événements, M. Somé n'a eu d'autre choix que d'obtempérer. Dans la foulée, l'inspecteur chef, décida de régler l'autre partie de la note de frais qui devait normalement incomber à la mairie. Et voilà donc que par un geste stupide de son directeur, l'école de Bakon s'est retrouvée sous les projecteurs. Et comme le malheur n'arrive jamais seul, l'incident de Batié allait révéler une autre escroquerie à laquelle se livrait le directeur de l'école de Bakon. C'est par un coup de fil anonyme dénonçant les pratiques de M. Somé que le dispositif de contrôle va être mis en branle.
Trafic de vivres à l'école de Bakon
Dans le cadre des cantines scolaires, nombre d'écoles primaires sont dotées en vivres par le MEBA. A l'école de Bakon, le directeur s'était transformé en commerçant, vendant une partie des vivres aux boutiquiers et restaurateurs de la place. Les dotations portaient sur le riz conditionné dans des sacs de 50kg, la semoule de maïs également de
Des complicités dans le circuit
De toute évidence, le directeur de l'école de Bakon n'a pas pu agir seul. Certains affirment que si le pot aux roses a été découvert, c'est parce que le directeur n'était pas assez généreux. C'est donc son égoïsme qui l'aurait perdu. Dans cette solidarité mafieuse, certains directeurs d'école se montreraient très généreux envers leur hiérarchie à travers de petits cadeaux régulièrement offerts. Par retour d'ascenseur, ces derniers sont généralement maintenus à leur poste aussi longtemps que possible. Mais il s'agit là d'une coterie délictuelle qui menace l'existence même de l'école, surtout dans les zones rurales, quant on connaît l'importance de la cantine dans la fréquentation scolaire. Près de 5 milliards de FCFA sont annuellement consacrés par l'Etat burkinabè aux cantines scolaires. Malgré l'importance de cette somme, elle s'avère largement insuffisante au regard du boom des effectifs ces dernières années. Et ce sont ces efforts que des enseignants indélicats menacent de réduire à néant. L'école burkinabè a amorcé ces derniers temps un tournant vers la mise en place de cantines endogènes destinées à être entièrement prises en charge par la communauté. L'idée est que ces cantines vont être entretenues à partir des produits de champs, de jardins scolaires ainsi que de vergers communautaires. L'expérience est déjà en route dans près de 2000 écoles à travers le pays. Il est certes encore trop tôt pour en faire le bilan, mais l'implication consciente de la communauté dans la gestion des cantines est assurément l'antidote aux dérives constatées dans certaines écoles et qui, si l'on ne prend garde, risquent de faire tache d'huile et ruiner ainsi tout espoir de développement de l'école burkinabè. Daniel Ollo Palé et Germain B. Nama