Poutine fait ses adieux et présente ses excuses

A une semaine de l'élection présidentielle russe, Vladimir Poutine a reçu à Moscou ses homologues de la Communauté des États indépendants. Il a profité de ce sommet pour leur présenter son dauphin, Dmitri Medevedev, et ses excuses pour les crimes racistes commis en Russie.

Les douze présidents de la Communauté des Etats indépendants ont participé à un sommet informel qui s'est tenu à Moscou le 22 février. "Personne ne s'est risqué à ignorer" l'invitation de Poutine, note Vremia Novostieï. Si chargés que soient leurs agendas respectifs, tous étaient présents – même l'Arménien Robert Kotcharian, confronté à des manifestations de l'opposition contestant à Erevan les résultats de l'élection présidentielle, l'Ouzbek Islam Karimov, qui était en visite officielle à Moscou deux semaines auparavant, et l'Ukrainien Viktor Iouchtchenko qui venait de rencontrer Poutine. "Bref, le taux de participation des présidents de la CEI à Moscou a été de 100 %, à l'instar d'un scrutin électoral organisé en Tchétchénie", commente ironiquement le journal.

La présence du Géorgien Saakachvili, tout aussi remarquable, témoigne d'un rapprochement entre Tbilissi et Moscou. "Poutine a directement signifié à Saakachvili qu'à l'avenir la qualité des relations russo-géorgiennes dépendrait de la question de l'adhésion de la Géorgie à l'OTAN", rapporte le quotidien géorgien Resonansi. "Difficile de dire si la menace est sérieuse, mais il est clair que ce thème restera au centre des relations bilatérales." Quelques avancées positives sont à relever : les vols directs Moscou-Tbilissi, interrompus en septembre 2006, seront rétablis, et l'obtention de visas russes normalisée. Par ailleurs, les vins géorgiens pourraient bientôt revenir sur le marché russe.

A une semaine de l'élection présidentielle russe, ce "fut un sommet d'adieu dans tous les sens du terme. Des adieux de Vladimir Poutine à ses collègues, pour marquer son départ mais aussi la fin de la dernière illusion d'unification des lambeaux de l'URSS autour de la Russie. 'Le divorce civilisé' est achevé : grâce aux efforts des pragmatiques du Kremlin et de Gazprom, les voisins de la Russie ont appris à survivre seuls ou trouvé de nouveaux protecteurs", note RBC Daily, quotidien économique russe.

Pour ce sommet d'adieu, le journaliste de Kommersant Andreï Kolesnikov attendait de la part de Poutine une certaine émotion, "des mots du genre : 'Prenez soin de la CEI !' [lorsqu'il a quitté le pouvoir, Eltsine avait déclaré : 'Prenez soin de la Russie !']. Mais Vladimir Poutine s'est retenu. Un simple toussotement aurait suffi", regrette le journaliste.

Mais l'autre objet du sommet informel fut la présentation par Poutine de son dauphin, le premier vice-Premier ministre Dmitri Medvedev, "reçu dans la CEI". "Pour la première fois durant sa campagne électorale, Medvedev a parlé comme un chef d'Etat", note Kommersant à propos de l'intervention du favori de Poutine devant les douze présidents des pays membres de cette organisation.

Reste que Poutine a donné à ce sommet une coloration particulière, par une déclaration inédite sur la multiplication des crimes racistes commis en Russie [depuis le début 2008, quatre Kirghizes ont été assassinés en Russie]. "Nous [le] regrettons et ferons tout pour retrouver, confondre et condamner les criminels. Nous lutterons sns relâche et de manière inflexible", a promis le président sortant, cité par Vremia Novosteï. Pour ce journal, "en Russie, de telles promesses n'ont été faites ces dernières années qu'à un niveau ministériel. En comparaison, les paroles de Poutine valent bien plus. Ce n'est pas dans les habitudes du dirigeant russe de présenter des excuses publiques devant des étrangers." Reste quand même à observer quelles suites auront ces propos inhabituels.

 Philippe Randrianarimanana et Alda Engoian


28/02/2008
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