Les Sankara réagissent aux propos de Blaise Compaoré
Lors des festivité de la ‘’Renaissance démocratique’’ dans la ville de Pô, Blaise Compaoré a évoqué ses relations avec Joseph Sankara, le père de Thomas Sankara. Les enfants Sankara manifestent leurs mécontentements à travers cet écrit.
"Au nom du fils (Thomas, décédé le 15 octobre 87), de la mère Marguerite (décédée le 6 mars 2000), du père (Joseph décédé le 4 août 2006) nous (enfants vivants) sollicitons la compréhension du peuple burkinabè pour le présent écrit. Jamais auparavant, à l'exception de la commémoration du 20e anniversaire de la mort de Thomas, nous ne nous étions exprimés dans la presse sur nos rapports avec Blaise Compaoré.
Nous y sommes aujourd'hui contraints en raison des propos présidentiels qui nous interpellent. Nous avons senti l'obligation de situer le peuple du Burkina sur certains aspects des déclarations du président à Pô au sujet de sa relation avec la famille. Nous l'avons lu dans "Le Pays" du lundi 22 octobre 2007 et L'Observateur en date du même jour. Nous les citons respectivement: «Par rapport à ses relations avec le vieux Sankara, « ... » il dit avoir eu des contacts cordiaux jusqu'à un certain moment avec le vieux. Mais deux incidents l'ont amené à arrêter. Le vieux lui aurait dit qu'il avait faim. Blaise Compaoré lui avait alors fait envoyer un « pli ». Ce pli lui est revenu plus tard soi- disant que la famille n'avait pas besoin de son appui. Une seconde fois, il a essayé. Même scénario. Il a donc arrêté ».
« Avec le père de Sankara, nous avons eu un certain nombre de contacts cordiaux, mais un certain nombre de situations m'ont fait traîner après... Une fois, le papa de Thomas est passé par le président de l'AN pour qu'il me dise: «Dis à mon fils que j'ai faim .» J'ai envoyé un pli pour lui, mais après, on m'a renvoyé le pli, une seconde fois, il est passé par le colonel Dienderé, j'ai encore envoyé un pli mais deux ou trois jours après, les enfants ont renvoyé le pli pour dire qu'ils n'avaient pas besoin de ça. Je me suis dit alors qu'il ne fallait pas agir contre la volonté des gens ».
Sachez que notre père ne lui a jamais rien demandé.
Décidément, avec Blaise Compaoré, nous aurons tout vu et entendu. Il ne nous aura rien épargné. Les habitudes ont la vie dure chez lui: cette habitude d'accabler les morts mais aussi cette fois les vivants que nous sommes.
Après la douleur incommensurable de l'assassinat de notre frère Thomas que nous venons de commémorer ce 15 octobre 2007 et la perte encore vive dans nos cœurs de nos parents, voilà que les habitudes resurgissent. C'est parce que notre père n'est plus là pour répondre que le président du Faso, notre jadis frère, tient des propos, osons le qualificatif, indignes. C'est nous, les enfants du défunt, qu'il accuse d'avoir été des obstacles à la normalisation de ses rapports avec la famille. Dieu merci, nous sommes encore vivants.
Nous n'avons, certes, pas les moyens des princes qui nous gouvernent mais jamais, au grand jamais, notre père n'a été dans le dénuement au point de demander l'aumône à celui qu'il a toujours considéré comme son fils et dont il a toujours attendu qu'il franchisse le seuil de sa cour comme il le faisait du vivant de Thomas, une phrase leitmotive qu'il a emportée avec lui dans son repos éternel.
S'il y a des valeurs que Papa Joseph a incarnées sa vie durant et nous a inculquées, et dont Thomas a été l'illustration la plus visible, c'est bien les valeurs de dignité et d'intégrité.
Sans vouloir entrer dans une quelconque polémique, les maladroites tentatives
présidentielles pour normaliser la situation avec la famille avec des enveloppes ont toujours essuyé le refus de notre père qui a toujours réitéré que sa préoccupation n'était pas financière mais qu'il attendait que de ces deux illustres fils, celui qui était
vivant vienne le rencontrer.
Nous ne citerons aucun nom mais des témoins, en l'occurrence certains envoyés du président, peuvent confirmer ces faits.
Les parents du défunt Sambo Joseph Sankara, par notre voix (les enfants), demandent à Blaise Compaoré de laisser reposer en paix les âmes des défunts à qui nous, nous vouons un profond respect."
Les enfants de Sambo Joseph Sankara
Déclaration publiée dans L’Observateur et Le Pays