Avons-nous eu tort de parler de la maladie du président ?

Curieusement, ce sont des journalistes qui n'apprécient pas ce que nous avons écrit à propos de la maladie de Blaise Compaoré. Le sujet est-il tabou ?
Nos confrères de L'Hebdo et de L'Opinion ne semblent pas avoir apprécié que nous ayons évoqué la maladie du président Blaise Compaoré. Tous nous prêtent des intentions cachées, si ce n'est de l'avoir écrit sous la dictée d'une tierce personne qu'ils n'ont pas, hélas le courage de nommer. Il semble visiblement que nous avons touché là à un tabou. Aussitôt le journal paru, nous avons eu droit à des images de la TNB, montrant le président en plein exercice physique avec sa fille et des membres du gouvernement, à l'occasion de la pratique du sport de masse. Ces images diffusées en boucle étaient censées répondre à l'écrit de L'Evénement. Et puis, quelques jours après, dans une Lettre pour Laye, L'Observateur Paalga, reprenant l'information, nous apporte une précision que nous n'avions pas. Le président, comme nous l'avons écrit, pourrait bien se rendre à Paris pour une visite médicale. Mais seulement pour voir un ophtalmologue et non pour les maladies que nous présumions. Disons le tout de suite. Nous ne sommes pas des charognes, contrairement à l'amabilité du journal L'Opinion qui nous traite bien confraternellement de "ces canards de troisième zone, qui se repaissent et vivent du sang des célébrités et des faits divers macabres… ". Nous avons parlé de la maladie du président, parce que c'est le président des Burkinabè. A ce titre, il est quand même difficile d'ordonner qu'on nous envoie au "cinquième poteau ".
Nous avons évoqué le sujet, nous attendons bien évidemment que d'autres confrères, s'ils le peuvent, nous apportent la preuve contraire. Ce n'est pas ce à quoi nous avons assisté de la part de nos confrères de L'Hebdo et de L'Opinion.
Ils arguent des images diffusées par la TNB pour nous prendre à partie. Si le président se porte à merveille, Dieu merci, c'est tout le mal que nous lui souhaitons. Par contre, ces images ne peuvent pas être une réponse à notre article, pour la simple raison que nous n'avons pas écrit que Blaise Compaoré était grabataire ou qu'il était dans l'anti chambre de la mort. Nous avons évoqué, sous la foi d'informations que nous estimons crédibles, jusqu'à preuve du contraire, que le président aurait de sérieux soucis de santé. En disant cela, nous n'en tirons aucun plaisir particulier. Etant nous-mêmes un être humain, nous ne sommes pas à l'abri de soucis de santé. L'intention n'était pas donc de se "repaître" des soucis de santé du président, mais de l'évoquer comme une possibilité, au nom du droit des citoyens burkinabè à l'information.
Il reste maintenant la question de l'agenda. L'Hebdo et L'Opinion trouvent curieux que nous ayons évoqué maintenant le sujet, au moment où l'actualité nationale est plutôt dominée par les conséquences de la vie chère. Jusqu'à présent, nous avions la naïveté de croire que les journaux étaient libres de leur menu. La prochaine fois, nous ferons bien attention de soumettre notre menu à L'Hebdo et à L'Opinion pour qu'ils jugent de l'opportunité. Mais plus sérieusement, sans que nous ne voyons l'intérêt de nous justifier outre mesure, un sujet de ce genre au regard des précautions indispensables à prendre ne se traite pas comme cela. En tout cas l'idée que nous avons du journalisme et de notre responsabilité sociale, nous interdit d'écrire sous la dictée "des sources sûres".
Au total et malheureusement, exceptée la mention de nos confrères de L'Observateur Paalga qui ont apporté un élément d'information complémentaire, L'Hebdo et L'Opinion nous en veulent surtout d'en avoir parlé. Or, à notre avis, vu la proximité qu'ils ont avec le président, ils auraient autrement rendu service à notre peuple en lui apportant l'"information saine", surtout pour des canards de "la première zone" qu'ils prétendent être.
Sans nous en réjouir outre mesure et au regard de la violence des écrits de L'Hebdo et de L'Opinion, nous craignons hélas que nous ne soyons dans le vrai. Une chose est sûre le président est en France pour des consultations médicales. Jusque là et en vingt ans de règne, il ne nous souvient pas qu'il ait eu le besoin d'aller expressément à Paris, dans un appartement spécialement aménagé, pour y subir un examen quelconque.
La thèse de la fatigue n'est peut-être pas à exclure. Le facilitateur international qu'est devenu notre président n'a peut-être plus le temps. Il n'aurait même plus le temps de prendre soin de sa propre santé. Pour les Burkinabè qui sont quand même la cause qui l'a révélée au monde entier, il n'a pas tant ruiné sa santé. Et voilà que pour les autres, Blaise Compaoré se sacrifie et se meurt à petit feu. A notre humble avis, il faut qu'il existe une cause qui soit au-dessus de l'intérêt du Burkina Faso et des Burkinabè.
Enfin, il semble que nous avons diffusé cette information pour des desseins précis. C'est quand même assez fort de café. Mais apparemment, ces derniers temps, c'est la phobie des complots. Y aurait-il des raisons d'être aussi fébriles et frileux ? Le président Blaise Compaoré se porte comme un charme, en attestent les images de la TNB. La République est bien tenue avec le procès en cascades des casseurs. Tout va bien dans le meilleur des Burkina Faso possibles. Quoi donc ?

 

Par Newton Ahmed Barry



23/03/2008
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