Vol de numéraires chez François Compaoré : Hamidou avoue sous la torture

Vol de numéraires chez François Compaoré : Hamidou avoue sous la torture Le témoignage de Hamidou est suffisamment symptomatique de l'obscurité qui a entouré cette affaire de vol de numéraires chez François Compaoré. Près d'une décennie après, cet argent n'a pas toujours été trouvé. Selon la version fabriquée et mise dans la bouche de Hamidou et de son compagnon d'infortune Adama, tous deux ex-employés de François Compaoré, ils auraient volé cet argent et l'aurait remis à David Ouédraogo, qui projetait de perpétrer un coup d'Etat. Les aveux arrachés sous la torture et jamais vraiment confirmés ont servi de moyen pour condamner le malheureux Hamidou. En droit, que peuvent vraiment valoir des aveux obtenus dans ces conditions ?
C'est l'occasion de rappeler que des allégations ont circulé abondamment au moment des faits. Une de ces allégations a prétendu qu'en réalité, si cette somme a existé, elle aurait été remise en guise de cadeau par François Compaoré lui-même à Aïcha Koné, la diva de la chanson ivoirienne. Faux ou vrai ? Le constat qui a été fait, c'est que Aïcha Koné a mis des années avant de revenir au Burkina Faso, alors qu'elle était auparavant très fréquente au "pays des hommes intègres".
Au procès du 17 août 2000, le témoignage de François Compaoré n'a pas permis de voir plus clair. Par exemple, François Compaoré a soutenu avoir porté plainte à la gendarmerie. Or il était incapable d'être précis sur la date. La lettre plainte des Compaoré serait, dit-on, datée du 4 décembre 1997. Or comme on le sait depuis, cette procédure de saisine de la gendarmerie était un faux fait après coup pour régulariser une procédure. L'instruction du juge Armand Ouédraogo l'a bien montré. Les deux gendarmes chargés de l'instruction ont avoué n'avoir jamais entendu David Ouédraogo et n'ont fait que recopier un texte remis par Marcel Kafando.
Dans cette affaire donc, il y a désormais un coupable de vol, mais on se sait pas ce qu'il est advenu de l'argent volé. Et ce n'est pas une petite somme. Il s'agit de 19 millions de francs CFA. Selon les aveux extorqués à Hamidou, l'argent aurait été remis à David Ouédraogo. Qu'en a-t-il fait ? Pour l'instant, personne n'en sait rien. L'intéressé est mort le 18 janvier 1998 des suites de tortures. Il a subi les mêmes brûlures que Hamidou Ilboudo. Son cadavre n'a jamais été vu. Il aurait été enterré à l'initiative de François Compaoré par une quarantaine de militaires au cimetière, route de Saponé. Pendant l'instruction, une tombe a été montrée à l'avocat de sa famille comme étant la sienne. L'exigence de l'avocat demandant à l'Etat de faire la preuve qu'il s'agit bel et bien de la tombe de David Ouédraogo n'a jamais été satisfaite. Comme de nombreux morts de cette période sombre de l'histoire politique de notre pays, on ne saura pas si effectivement les tombes abritent les cadavres présumés.
Il faut aussi rappeler que c'est dans la brousse du village de Laye, sur la route de Ouahigouya, que Hamidou, David et Adama ont été entraînés et brûlés. Les militaires soupçonnés d'avoir exécuté cette basse besogne étaient au nombre de trois. Marcel Kafando, Edmond Koama et Yaro Ousseni. Ils avaient écopé de peines lourdes à l'occasion du procès du 17 août 2000. Les deux premiers ont été condamnés à 20 ans chacun de réclusion criminelle. Aucun d'eux n'a purgé complètement sa peine. Edmond Koama est mort quelques mois après le procès. Marcel Kafando est sorti l'année suivante de prison pour lutter contre une maladie qui a mis dix ans avant de l'emporter. Yaro Ousseni avait été lui condamné à 10 ans de prison. Il a fait seulement 5 ans, puis a bénéficié des remises de peine qui ont conduit à sa libération avant le terme de sa condamnation. Des cinq condamnés, seul Yaro Ousseni est encore de ce monde.
Tirant leçon de la tenue du procès, nous écrivions dans L'Indépendant (n°365 du 5 septembre 2000), "Marcel Kafando aurait soixante ans quand il sortira de prison, s'il était encore vie". Effectivement, c'est en 2020 qu'il aurait fini de purger sa peine. On ne sait pas de quoi demain est fait, mais il est impensable de croire qu'à cette date, les Compaoré seront là à nous régenter. Mais qui sait ?
NAB



16/02/2010
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