Inondation : l'heure des choix difficiles et des illusions perdues
Au juste que va faire le gouvernement pour les sinistrés du 1er septembre de Ouagadougou, dont il ne connaît apparemment pas le nombre exact ? A mesure que la cagnotte des dons gonfle dans l'ex palais, les illusions des sinistrés dégonflent. Ils ne devraient pas attendre grand chose. Des écoles, les plus chanceux rejoindront les tentes et après ? Les prévisions de prises en charge devraient, selon toute évidence pendre fin courant octobre et au plus tard début novembre. Le processus de désengagement de l'Etat se fera t-il à la manière de celui réservé aux pawéto de l'opération "Bayiri" ? A l'époque, nos frères rapatriés, en convoi officiel, de la Côte d'Ivoire avaient été parqués au Stade du 4 août après une réception en fanfare. Les premiers jours, ils reçurent café lait et pain au petit déjeuner. La semaine suivante on substitua la bouillie au café. La semaine d'après il n'y avait plus la bouillie. Les rapatriés ont compris que s'ils ne voulaient pas mourir de faim, ils avaient tout intérêt à se chercher. C'est ce qu'ils firent. Les sinistrés du 1er septembre courent-ils un pareil risque ? Ce n'est pas impossible. Le gouvernement ne sachant pas lui-même exactement ce qu'il va faire d'eux après l'épisode de l'installation dans les tentes.
En attendant, le gouvernement s'est réveillé. En son conseil extraordinaire du 19 septembre dernier il a pris des mesures énergiques pour interdire la construction dans les zones inondables et a délimité une bande de servitude de
L'adoption de ces mesures dans l'urgence ne solde pas les comptes. Cette fois, il faut que l'Etat s'assume en adoptant une politique des normes de construction. C'est de la responsabilité de l'Etat d'édicter les normes minimales imposables à l'édification des maisons et des immeubles. Le seul permis de construire ne suffit plus. L'Etat ne pas laisser faire parce qu'en cas de catastrophe c'est lui qui est responsable. Il est temps de penser autrement l'accès au logement pour le plus grand nombre que par le biais des lotissements sauvages. Les communes ont la responsabilité de promouvoir le logement social accessible aux plus démunies. Ces mesures devraient être prises aussi, sans trop tarder.
Le conseil des ministres a désigné le comité qui aura en charge la gestion des secours d'urgence. Ses prérogatives sont sommairement énumérées dans le décret. Il reste à le voir à l'œuvre.
On a commencé à reloger les sinistrés dans de nouveaux sites. De nouvelles tentes, fruit de la solidarité internationale, sont dressées pour les accueillir. Pendant combien de temps ? Ces sites sont prévues pour être des transites vers des logements plus décents et définitifs. Mais on n'en connaît pas les délais. Le gouvernement jusqu'à présent a communiqué par "on ne fera pas ceci" en restant vague sur ce qu'il va faire effectivement. Il faut souhaiter que le provisoire des tentes ne se transforme en définitif.
Dans les nouvelles tentes, nombre de sinistrés auront l'impression d'être passés de l'enfer au paradis. Les écoles d'où ils viennent étaient trop exiguës et pas assez indiquées pour l'intimité. Il faut dire que leur logement des non lotis, pour l'essentiel ne payait pas non plus de mine. La solution des tentes constitue donc un léger mieux, dans ce parcours de la misère humaine, même si elle est loin de faire l'unanimité.
Mais il faut que la rentrée scolaire se fasse. Cet appui de la communauté internationale sauve l'Etat, en attendant de voir venir des solutions plus durables. Cinq (05) sites sont aménagés pour accueillir les sinistrés. Il s'agit : de l'hippodrome, de l'Institut nationale de la jeunesse de l'éducation physique et sportive (INJPS), les secteurs 16,17 et 7.
Les opérations de montage des tentes ont commencé le 19 septembre dernier avec l'assainissement des lieux par la brigade verte, dénommées aussi "les femmes de Simon". Mais il faut croire que les éléments sont entrain de s'acharner sur les malheureux. Un orage est vite repassé par là endommageant une partie des tentes installées dans la matinée. Il a fallu reprendre les installations le lendemain. De l'avis d'un technicien, il fallait faire un terrassement pour élever le niveau du sol pour qu'en cas de précipitation l'eau ne pénètre pas dans les tentes. Il ne semble pas avoir été entendu. Et cette suggestion a failli lui coûter le marché de l'installation des tentes. Il s'est vite rangé.
Les sinistrés destinataires des tentes attendaient sans information, sur leur éventuelle destination. Au complexe scolaire Sainte Dominique de Zongo Madeleine, Poko Kaboré sinistré et malade était incapable de dire quel sera son pont de chute, dans la journée du 19 septembre. Rescapée des eaux du 1er septembre, elle a été sauvée de justesse, par des voisins charitables, parce que affaiblie par la maladie elle ne pouvait pas quitter son "non loti" cerné par les flots. Depuis elle se remet difficilement, parce que si elle a trouvé un refuge, elle attend toujours des soins annoncés mais qui tardent à arriver. Pour l'instant elle doit se contenter du paracétamol.
Les salles de classes sont de véritables nids de moustiques, particulièrement en cette période de l'année. Sauvés des eaux et exposés aux moustiques, les sinistrés se réjouissent quand même d'être encore en vie et se posent donc les problèmes des vivants. Où inscrire les enfants ? Sur les nouveaux sites, est-ce que les écoles sont prévues pour les enfants ? Dame Kaboré mère de 3 enfants, ne pense pas qu'à guérir. Elle est préoccupée par le sort de ses enfants.
La ministre de tutelle a promis que dans les sites il y aura des écoles pour parer aux difficultés de déplacement.
La question de la nourriture et de l'insalubrité qui était récurrente au début a trouvé solution. Il faut faire face à présent aux intrus de la misère. D'autres indigents sont attirés par les repas relativement copieux des sinistrés. Les responsables des sites sont obligés de les tenir à respect.
Ce qui crée des difficultés supplémentaires à ceux qui s'occupent de la distribution. La situation est un peu particulière à l'école Paspanga. Dans cette école chaque famille reçoit deux plats (Yoruba) de riz non cuit par jour, une boîte de sardine et une miche de pain. La famille Kaboré a élu domicile, depuis le 2 septembre dans une des salles de cette école et attend des autorités qu'elles trouvent une solution définitive pour leur situation. Pour le chef de famille, Mahamoudou Kaboré, les tentes ont l'inconvénient de chauffer le jour. Il faudra donc de l'ombre pour passer la journée. Peut-être s'en chargera t-il parce que dans le kit, cet extra n'est pas prévu.