Comment les richesses du Congo s?évaporent dans des paradis fiscaux
La fuite des capitaux d?Afrique vers le reste du monde, notamment vers les paradis fiscaux et un certain nombre de banques, est une question primordiale pour comprendre les entraves que rencontre le développement africain. Deux exemples congolais illustrent bien cela :
Le Congo-Brazzaville dispose d?une société nommée Société
Nationale des Pétroles du Congo (SNPC) qui est chargée de commercialiser le pétrole que produisent les compagnies pour le compte du Congo. Le président de la SNPC a vendu pendant plusieurs années ce pétrole, pour le compte du Trésor public, très en dessous des cours internationaux à des sociétés qu?ils contrôlaient.
Ces sociétés revendent ensuite le pétrole au prix du marché et encaissent au passage des commissions qui représentent plusieurs millions de dollars par cargaison. Ces sociétés qui sont bien souvent domiciliées dans des paradis fiscaux (ex : les Bermudes) permettent de détourner des centaines de millions de dollars, au profit de proches du Président Sassou-Nguesso.
Autre exemple de l?utilisation de ces paradis fiscaux, l?affaire Likouala, toujours au Congo-B. Lorsqu?en 1997, Denis Sassou-Nguesso reprend le pouvoir via un coup d?Etat, il découvre que son prédécesseur avait bradé à Elf plusieurs actifs pétroliers. Il exige alors de la compagnie une compensation. En 2003, après plusieurs années de négociations, Elf, devenu Total, accepte de céder à l?Etat congolais sa participation de 65% dans le gisement de
Likouala. Mais au lieu d?en confier la gestion à la SNPC, le Congo revend le gisement pour 160 millions de dollars à Likouala SA, une société de droit congolais totalement inconnue contrôlée par une société enregistrée dans les îles vierges britanniques, elle-même contrôlée par un trust domicilié sur l?île de Jersey. Le Congo a cependant
fourni au FMI « l?assurance que la république du Congo,
sa compagnie pétrolière (SNPC) et Total sont les seules parties impliquées dans cette transaction, et que tous les bénéfices et profits attenants leur reviennent et à personne d?autre ». Malheureusement, les revenus générés par le gisement sont introuvables.
Total dit ignorer leur destination, bien que l?administrateur de Likouala SA soit un salarié de Total. Encore de l?argent qui échappe au Trésor Public Congolais et une nouvelle évaporation fiscale dont il est impossible de remonter à l?origine.
Nous sommes dans une situation d?hypocrisie mondiale. Les
pays riches appellent à la bonne gouvernance, à la lutte contre la corruption, et, dans le même temps, assurent l?ensemble des infrastructures de la corruption et des détournements, à savoir le secret bancaire et les paradis fiscaux.
Extrait d?une conférence de Xavier Harel
auteur de « Afrique, pillage à huis clos », Fayard, 2006
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