Faisons échec à la montée de la peste brune*!

Les réactions suscitées par la publication du rapport de la Cour des comptes révèlent deux choses : le besoin de transparence dans les affaires publiques et le refus obsessionnel de l'impunité. Si la décision des plus hautes autorités de rendre publics les rapports de l'autorité de contrôle des comptes de l'Etat mérite d'être saluée, il faut dans la même foulée rendre hommage à nos magistrats qui ont accompli un travail remarquable. On peut comprendre que ce travail contienne encore des insuffisances dont certaines peuvent être graves. Nous pensons en particulier au fait que les comptes gérés par les comptables publics ne soient pas encore "jugés" (pour employer l'expression consacrée), alors que c'est justement à ces niveaux que se concentrent les contributions financières les plus significatives des Burkinabè au budget national. Mais comprendre, ce n'est pas cautionner le laxisme. Car, une chose est d'admettre qu'il y a des difficultés conjoncturelles à effectuer un travail qui exige des moyens techniques, humains et sans doute aussi financiers, moyens dont on pourrait ne pas en disposer ici et maintenant, autre chose est de penser que les Burkinabè sont prêts à accepter que l'on s'en prévale pour occulter de probables pratiques de prédation dont les conséquences négatives sur la vie de nos compatriotes pourraient être irrémédiables. C'est pourquoi, en dépit du ton parfois acerbe du débat national, force est de reconnaître que celui-ci est éminemment vertueux. Si l'on admet qu'il ne saurait y avoir de changement social qualitatif sans le préalable d'une prise de conscience, alors le débat actuel sur la gouvernance est absolument capital pour l'avenir de la nation.

Et c'est bien à ce niveau qu'il convient de situer le travail, à notre avis, remarquable des hommes de média qui, à des degrés divers, assurent le rôle de relais pour permettre que nos compatriotes soient informés. On ne le dit jamais assez, l'information est un droit garanti par la loi fondamentale au Burkina. C'est la reconnaissance qu'il s'agit d'une nécessité tout aussi vitale que le droit à la vie. Car la vie, pour ne pas être grégaire, a besoin d'être transformée par une action éclairée. Le rôle des hommes de média se situe donc en amont de ce processus de transformation vitale. Et Dieu sait combien les Burkinabè nourrissent un ardent désir de vivre mieux.

Comment dans ces conditions ne pas dénoncer ces cagoulards qui s'érigent en chevaliers d'un ordre immuable d'exclusion, celui-là qui profite aux puissants du jour, à l'ombre desquels prospèrent ces ignobles hommes de main. Dans une récente fatwa, d'obscurs individus ont osé menacer de mort des confrères, parce que ces derniers osent poser sur la place publique les problèmes de gouvernance qui minent le pays. Quelle bassesse ! Malheureusement, ce sont les choses les plus basses qui conduisent souvent aux plus grandes tragédies humaines. C'est pourquoi, il nous faut nous dresser dès maintenant pour rejeter ce honteux chantage. Quels sont les états de service de ces personnages lugubres qui citent l'assassinat de notre confrère Norbert Zongo ainsi que l'incendie du véhicule de Sam's K. le Jah comme participant de l'entreprise de "salut public" dont ils seraient les porte-flambeaux ? Quoiqu'il en soit, il importe de prendre au sérieux la menace de cette véritable peste brune. Les alertes de notre confrère Norbert Zongo sur les menaces qui pesaient sur sa vie n'avaient pas fait bouger les âmes bien pensantes. On connaît la suite.

Nous devons montrer cette fois que nous avons appris la leçon et qu'il dépend de nous que l'histoire ne se répète plus. C'est pourquoi nous nous permettons à notre tour de lancer un appel urgent. Nous nous adressons en premier lieu aux plus hautes autorités de ce pays. Elles ont la responsabilité de protéger la vie des Burkinabè. Pour ce faire, elles disposent de la puissance de l'Etat. Nous nous ferons les témoins de ce que les choses auront bougé dans le sens d'une plus grande sécurité de nos confrères menacés de mort. A la toute nouvelle Commission de l'Informatique et des Libertés, nous lui adressons solennellement ce cas pour étude et décision à prendre : si l'informatique peut servir aux basses besognes du type de ce qui est en cause aujourd'hui, elle doit pouvoir servir aussi à éradiquer le danger de la peste brune qui croît avoir trouver une arme secrète pour accomplir ses forfaits. L'origine de la menace est techniquement décelable et les marchands de mort ne doivent nulle part se trouver en sécurité. Mais il va sans dire qu'un tel projet ne peut aboutir sans une mobilisation sociale. Premières intéressées, les organisations de la presse doivent se mettre debout pour prendre la tête de cette croisade sociale, afin que plus jamais ne vienne à l'esprit de quiconque de menacer de mort un journaliste, au motif que son travail dérange. Le Conseil Supérieur de la Communication, si soucieux du respect par les médias des règles de la profession et qui parfois n'hésite pas à brandir le gourdin, doit aussi montrer qu'elle a avant tout vocation à défendre les journalistes. C'est plus que jamais le moment, quand des journalistes sont menacés dans leur vie. C'est le lieu pour les uns et les autres de méditer ce poème de Martin Niemöller : "Quand ils sont venus chercher les communistes, Je n'ai rien dit, Je n'étais pas communiste. Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, Je n'ai rien dit, Je n'étais pas syndicaliste. Quand ils sont venus chercher les juifs, Je n'ai pas protesté, Je n'étais pas juif. Quand ils sont venus chercher les catholiques, Je n'ai pas protesté, Je n'étais pas catholique. Puis ils sont venus me chercher, Et il ne restait personne pour protester" A bon entendeur

 

" référence aux escadrons nazis qui arboraient des chemises brunes

 

http://www.evenement-bf.net/pages/edito_157.htm



18/02/2009
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