Crise à Air Burkina : Les agents dénoncent la discrimination

Le personnel d’Air Burkina a observé un arrêt de travail de deux jours les 1er et 2 février 2008 pour dénoncer leurs conditions de travail.

 

"A travail égal, salaire égal. Chelala : raciste" pouvait-on lire, affiché sur le portail du siège de la compagnie Air Burkina, le vendredi 1er février 2008. Pour cause, le personnel a décidé d’aller en grève pour dénoncer leurs mauvaises conditions de travail. Selon Yacouba Sawadogo, secrétaire général adjoint du comité CGTB, Air Burkina et délégué du personnel, la grève est liée à la perte des avantages des travailleurs. Ils denoncent entre autres l’inégalité dans le traitement salarial, la non revalorisation des salaires depuis la privatisation, la non formation des employés (des pilotes), la non conformité par rapport aux autres employés du groupe des frais de mission des Burkinabè, la non considération des pilotes burkinabè. "Quand on a la peau noire, on a droit à rien", a martelé M. Sawadogo.

 

Pour preuve, d’après lui un pilote burkinabè et de surcroît commandant de bord touche environ 900 000 F CFA tandis que son assistant (copilote), un expatrié, touche le double à savoir 1 800 000 F CFA. Pire, a-t-il continué, les pilotes burkinabè (commandant de bord) sur l’Airbus à destination de Paris ont touché par mois et presque deux années 1 000 euros par mois mais les pilotes expatriés ont 1000 euros par jour (environ 20 000 000 F CFA par mois). Et le secrétaire général du comité CGTB Air Burkina, Francis Ouédraogo, de renchérir que ces pilotes expatriés sont logés à Ouaga 2000 et véhiculés.

 

Toujours au sujet des pilotes, les responsables du personnel ont donné une autre preuve d’injustice dans le traitement des pilotes. Ils ont fait comprendre que la prime horaire d’un commandant de bord burkinabè est de trois mille neuf cent cinquante francs (3 950 F CFA). Alors que celle d’un pilote expatrié surtout un subalterne du commandant est payé à 21 500 F l’heure, même s’il vient de quitter l’école. Et M. Sawadogo d’ajouter que les frais de scolarité des pilotes expatriés recrutés sont même remboursés par la direction générale d’Air Burkina.

 

Quant aux frais de mission, les délégués du personnel ont affirmé que les travailleurs sont traités différemment des autres travailleurs dans les autres pays notamment le Mali. "Nous avons constaté que la compagnie aérienne du Mali faisant partie du même groupe que nous, est traitée différemment. Pourtant c’est Air Burkina qui a contribué à asseoir la compagnie malienne en fournissant des techniciens, des pilotes, des hôtesses, des stewards", a expliqué M. Sawadogo. D’après lui, un Malien a 45 000 F CFA comme frais de mission, 25 000 F CFA pour son déplacement et 60 000 F CFA pour son hébergement à l’extérieur. Tous ces frais sont remis en espèces à l’agent. Mais malheureusement, a fait remarquer M. Sawadogo, le directeur général d’Air Burkina ne donne que 20 000 F CFA comme frais de mission aux travailleurs burkinabè.

 

Pour l’hébergement c’est le directeur général qui loue les chambres d’hôtel, a-t-il précisé. L’hébergement est chiffré à 120 000 F CFA. Mais le délégué du personnel accuse leur patron de loger les agents dans des hôtels de 25 000 F à 30 000 F CFA au lieu des supposés 120 000 F CFA. En un mot, pour lui, "c’est le racisme qui a pignon sur rue à Air Burkina". Durant toute la journée du samedi 2 février 2008, nous n’avons aperçu aucun responsable de la compagnie sur le lieu de la grève (siège de Air Burkina).

 

Néanmoins nous avons eu des échos des négociations dans un autre endroit entre les délégués des travailleurs et les responsables de la compagnie avec comme facilitateurs le secrétaire général du ministère des Transports, Mathieu Bouda et la secrétaire générale du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, Léontine Zombré. Vers 18 h 20, samedi 2 février 2008, les représentants du personnel sont revenus avec comme acquis un protocole d’accord entre les deux parties. Il ressort du document que "la délégation de la compagnie Air Burkina s’est engagée à examiner favorablement et avec la plus grande attention les points portant sur entre autres : la revalorisation salariale du personnel et le réajustement sur l’Air Bus A319 et le MD 87, l’application de la grille des indemnités et des frais de missions, l’application de la note de service sur l’indemnité de transport ; la régularisation des travailleurs en situation irrégulière".

 

L’accord a été signé pour la compagnie Air Burkina par son président de conseil d’administration (PCA), Mamady Sanoh, et le directeur des Ressources humaines de son Altesse Aghan Kan, Louis Olivares. Du côté des travailleurs, le document a été signé par les délégués du personnel et syndicaux, Damata Ganou et Francis Ouédraogo, représentant l’Etat comme facilitateurs, l’accord a été paraphé par le secrétaire général du ministère des Transports, Mathieu Bouda, et la secrétaire générale du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, Léontine Zombré.

 

Voila qui engage et la société Air Burkina, et ses travailleurs, et l’Etat burkinabè. Pour matérialiser l’accord, un comité de négociation sera mis en place ce lundi sous la supervision du ministère des Transports. Qu’à cela ne tienne, Francis Ouédraogo appelle toujours ses collègues à la mobilisation. Et de souligner que leur seule arme pour défendre leurs intérêts reste leurs syndicats respectifs.

 

Alassane KERE


06/02/2008
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