Demande de remise en liberté du journaliste Jean-Bosco Talla
"Je n’ai fait que reproduire des extraits d’un livre. Je ne vois pas ce que j’ai fait de mal et je suis donc tout à fait serein", a confié Jean-Bosco Talla, le 17 décembre 2009, au correspondant de Reporters sans frontières au Cameroun, Jules Koum Koum, venu lui rendre visite à la prison centrale de Kondengui, à Yaoundé. Détenu depuis une semaine, le journaliste est jugé pour "offense au chef de l’Etat". Il a été présenté au tribunal de grande instance de Mfoundi, le 16 décembre, et a plaidé non coupable. Il doit à nouveau être entendu le 21 décembre prochain.
"Une fois de plus, nous rappelons aux autorités camerounaises que rien, dans une affaire de diffamation, ne saurait justifier la détention d’un journaliste", a déclaré Reporters sans frontières.
Jean-Bosco Talla , directeur de publication de l’hebdomadaire privé Germinal, a été arrêté le 10 décembre et conduit au Secrétariat d’Etat à la Défense (SED), une unité policière en charge de la lutte contre le grand banditisme. Quatre jours plus tard, dans la soirée, il a été transféré à la prison Kondengui et a été présenté, le 15 décembre, au procureur de la République.
Les autorités reprochent à Germinal d’avoir publié, dans son édition n°46, un extrait du livre d’Ebale Angounou, intitulé "Sang pour sang", évoquant l’existence d’un "pacte secret" entre Paul Biya et son prédécesseur Ahmadou Ahidjo. L’auteur du livre prétendait que ce pacte, asujettissant l’actuel chef de l’Etat à Ahmadou Ahidjo, aurait été scellé "par un acte homosexuel." Jugé diffamatoire par les autorités, ce livre a été interdit en 2001.
Journaliste particulièrement militant, Jean-Bosco Talla est dans le collimateur des autorités. Fin juin 2009, il s’était plaint de recevoir des menaces de mort anonymes, quelques jours après la publication d’un rapport du CCFD auquel il avait collaboré, sur les biens mal acquis par Paul Biya.
Reporters sans frontières rappelle qu’un autre journaliste est actuellement détenu au Cameroun. Depuis le 26 septembre 2008, Lewis Medjo, directeur de publication de l’hebdomadaire La Détente Libre, est incarcéré à la prison centrale de Douala. Accusé de "propagation de fausses nouvelles" pour avoir publié un article sur une manœuvre présumée du chef de l’Etat pour contraindre le premier président de la Cour Suprême à prendre sa retraite anticipée, le journaliste a été condamné, le 7 janvier 2009, à trois ans de prison ferme, assortis d’une amende de deux millions de francs CFA (plus de 3 000 euros).
Au Cameroun, le gouvernement maintient toujours dans le code pénal des articles qui répriment durement les délits de presse. La publication d’un article jugé diffamatoire peut valoir à son auteur ou au responsable de publication une peine pouvant aller jusqu’à plusieurs années d’emprisonnement. RSF