Tchad : L'EUFOR au service de la Françafrique ?

La force militaire européenne ne fait pas l'unanimité chez les partenaires de la France, qui doutent de sa neutralité. Les 3 700 hommes arriveront toutefois dans l'est du Tchad dès le mois de février, note le quotidien algérien Liberté.

La force européenne de maintien de la paix au Tchad se déploiera en février dans l'est du Tchad pour sécuriser la région, à la frontière avec le Darfour, mais elle ne soutiendra pas le président tchadien Idriss Déby contre les rebelles, tente d'assurer le ministre des Affaires étrangères français, Bernard Kouchner.

Les pays qui doivent la composer ne sont pas emballés, certains suspectant le président français de vouloir tirer la couverture à lui et de nourrir la Françafrique, les intérêts de son pays dans le continent noir. Ces craintes sont relayées par des députés au Parlement européen et par les ONG. De leur côté, les groupes rebelles dans l'est du Tchad ont menacé d'attaquer la force européenne si elle s'ingère dans leur campagne contre Déby ou se range contre eux aux côtés des forces gouvernementales tchadiennes.

Les Européens et les rebelles se rejoignent pour mettre en doute la neutralité de l'EUFOR, étant donné que la moitié environ des effectifs de l'EUFOR viendront de France, pays qui dispose de troupes et d'avions de guerre basés au Tchad dans le cadre d'un traité militaire. L'EUFOR a officiellement pour tâche de protéger quelque 400 000 personnes déplacées dans l'est du Tchad, notamment de nombreux habitants dont les villages ont été détruits par les janjawid, des miliciens venus de la région soudanaise du Darfour. Le conflit opposant au Soudan les forces gouvernementales et aux janjawid, d'une part, à des rebelles darfouris, d'autre part, a fait quelque 200 000 morts en cinq ans, selon des experts, beaucoup moins, selon le gouvernement soudanais.

Les violences se sont propagées dans les régions voisines du Tchad et de la République centrafricaine, où quelque 3 500 soldats de la paix de l'Union européenne (ou davantage) seront déployés. L'opération baptisée EUFOR Tchad-RCA consiste à envoyer près de 3 700 soldats, dont plus d'une moitié viennent de France et le reste de treize autres pays européens, dans l'est du Tchad et le nord-est de la Centrafrique, deux chasses gardées de Paris et caricatures de la Françafrique.

Son déploiement a été retardé par manque d'équipement et d'hommes ! Pourtant, le président français a pris soin de faire avaliser l'intervention européenne par le Conseil de sécurité des Nations unies en septembre 2007, qui a confié à l'EUFOR nouvelle version la tâche de protéger la mission de police des Nations unies, ainsi que les civils exposés au danger : 241 000 réfugiés soudanais du Darfour dans l'est du Tchad et 3 000 autres dans le nord-est de la Centrafrique, ainsi que des 179 000 Tchadiens et 20 000 Centrafricains déplacés, à l'intérieur de leurs pays respectifs, en raison des violences.

Elle sera dirigée de Paris (!) par le général irlandais Patrick Nash, tandis que son homologue français, le général Jean-Philippe Ganascia, commandera sur place à Abéché les éléments de l'EUFOR dont la force devrait être au complet en juin. Il s'agit de la plus importante mission militaire de l'UE hors du continent européen et sans assistance de l'OTAN. L'Allemagne, qui avait largement participé l'été dernier à la précédente EUFOR en république démocratique du Congo, n'envoie que quatre officiers à l'état-major parisien.

Djamel Bouatta
Liberté



01/02/2008
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