La cohabitation à l'américaine, dernier argument de McCain

 Distancé dans les sondages, le candidat républicain se raccroche à un ultime argument de campagne : s'il est élu, il sera un rempart contre la toute-puissance des démocrates, assurés d'être majoritaires au Congrès.

           

                                         

La course à la présidence est entrée dans ses deux dernières semaines, et l'équipe de John McCain s'est décidée à formuler un nouvel argument de campagne qui cible autant les démocrates du Congrès que Barack Obama : garder un républicain à la Maison-Blanche est le meilleur moyen d'empêcher les démocrates de contrôler le calendrier législatif.

En prenant cette décision, les républicains reconnaissent que McCain est dans une situation très difficile. Cet argument devrait trouver son écho le plus fort chez les électeurs indépendants, mais il va aussi raviver le débat partisan, ce que McCain avait juqu'à présent évité de faire. "Cet argument fonctionne de manière indirecte", observe Charlie Black, un stratège de McCain. "On rappelle aux électeurs indépendants qu'en penchant pour Obama ils donnent carte blanche aux démocrates" [assurés d'être majoritaires au Congrès à l'issue des législatives, qui se tiennent également le 4 novembre].

Le 20 octobre, lors d'un meeting dans une banlieue de Saint Louis, dans le Missouri, le sénateur de Caroline du Sud Lindsey Graham a décrit McCain comme "le meilleur contre-pouvoir que l'on puisse trouver pour dire à Harry Reid, le chef de la majorité démocrate au Sénat, et à Nancy Pelosi, la présidente démocrate de la Chambre des représentants, de ne pas augmenter les impôts et les dépenses de l'Etat". La semaine précédente, McCain avait déclaré à plusieurs reprises qu'Obama "projette, tout comme Nancy Pelosi et le sénateur Reid, d'augmenter les impôts et les dépenses, et d'accepter une défaite en Irak".

Dans les prochains jours, McCain va marteler ce message en faveur d'un Etat partagé entre un président républicain et un Congrès démocrate de manière de plus en plus explicite. "C'est l'argument qui sera le plus efficace au cours des quatre ou cinq derniers jours", affirme Black.

Cet appel se situe dans le droit fil des derniers spots publicitaires en faveur de McCain, qui, étant sponsorisés par le Comité national républicain, et non par l'équipe de campagne elle-même, ont pris un accent extrêmement partisan. Bon nombre d'entre eux combinaient des critiques contre des membres démocrates du Congrès et des attaques contre Obama.

"Quand ça l'arrangeait, Obama collaborait avec le terroriste Bill Ayers. Quand on l'a su, il a menti. Obama : une ambition aveugle et un mauvais jugement", annonçait un spot, avant de passer à d'autres sujets sans aucune pause ni transition. "Les gauchistes du Congrès se sont battus pour les crédits immobiliers à haut risque. Les gauchistes du Congrès se sont opposés à une réglementation plus stricte. Puis le marché immobilier s'est effondré, ce qui vous a coûté des milliards de dollars. En temps de crise, nous avons besoin d'un bon leadership, pas d'un mauvais jugement."

Pour l'ancien gouverneur républicain de Virginie Jim Gilmore, qui brigue un siège de sénateur, les électeurs vont adopter une approche tactique. "Ils sont tout à fait conscients de la possibilité de se retrouver avec Obama à la présidence, une majorité [démocrate] à la Chambre des représentants et 60 élus [démocrates] au Sénat [sur 100], sans aucun contre-pouvoir, a-t-il déclaré. Ils ne veulent pas d'un gouvernement libre de toute entrave."

Donner une orientation partisane à la campagne dans les derniers jours de la bataille n'est pas sans risques pour McCain. Différents observateurs notent que les sondages effectués dans le courant de l'année ont montré que les électeurs font davantage confiance aux démocrates qu'aux républicains. S'attaquer aux membres démocrates du Congrès va également à l'encontre des tendances qui, plusieurs semaines avant le scrutin, garantissent quasiment aux démocrates le contrôle des deux Chambres.

"Pourquoi tous ces sièges républicains sont-ils devenus vulnérables ? Parce que l'étiquette républicaine a été ternie", observe J.J. Balaban, un consultant œuvrant pour des candidats démocrates du Colorado, du Wisconsin et de Pennsylvanie. "Tout argument fondamentalement antidémocrate va tomber à plat."

Sasha Issenberg
The Boston Globe



30/10/2008
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