Deal juteux de visas

Pour l'édition du Hadj 2009, le ministère saoudien du pèlerinage a dégagé 3000 visas pour le Burkina Faso. C'est le nombre de visas que l'Arabie Saoudite s'est engagée à délivrer aux pèlerins burkinabè. Ce qui veut dire que STMB Tour pouvait inscrire jusqu'à 3000 candidats au Hadj. Mais l'agence n'en a enregistré que 1525, organisateurs y compris. A peine la moitié des visas qui reviennent de droit au pays. Sachant qu'il y a des Burkinabè qui souhaitent faire le pèlerinage par des vols réguliers, le patron de l'agence a décidé de vendre les visas qui sont en principe gratuits. Les frais exigés pour la délivrance de ces visas sont, comme dans toutes les ambassades, des frais forfaitaires. Mais les documents que nous avons pu nous procurer montrent que le DG de STMB Tour, Mahamadi Ouédraogo, a vendu au moins une centaine de visas aux " pèlerins indépendants qui souhaitent se rendre sur les lieux saints par des vols réguliers ". Il monnayait le visa à 540 000 f CFA. Ce qui lui a permis d'engranger 54 000 000 f CFA. Pour lui, ces frais représentent les charges de l'organisation du Hadj. Ce qu'il faut noter cependant, c'est que la centaine de pèlerins auxquels il a vendu les visas ne sont pas à sa charge. Ce sont des "pèlerins indépendants". Ce qui veut dire que le billet, l'hébergement, l'alimentation et le déplacement sont à la charge desdits pèlerins. Où se trouvent alors les charges qui auraient occasionné ces frais ? Les frais de délivrance de visa sont largement inférieurs à cette somme. Ils tournent autour de 125 000 f CFA. La seconde explication du patron de STMB, c'est que de toutes les façons, lui ne pouvait pas aller chercher gratuitement ces visas pour les demandeurs qui souhaitent prendre des vols réguliers. Il laisse entendre que les 540 000 f CFA équivaudraient au prix du billet. Ce qui est improbable vu que l'Arabie saoudite a une ambassade au Burkina. Même dans ce cas, il serait plus équitable de permettre à toutes les agences qui le souhaitent d'aller chercher ces mêmes visas pour leurs clients qui ont décidé de voyager par des vols réguliers. Ce qui est le plus déplorable dans cette situation, c'est que des gens à qui STMB Tour a vendu des visas et qui avaient réservé leur vols de manière régulière à Ethiopian Airlines se sont vus déprogrammés au profit des pèlerins de STMB qui n'ont pas eu à temps leur visa. Ils ont été débarqués de l'avion alors qu'ils avaient déjà pris place. D'autres personnes ont été convoyées en Tunisie et en Libye pour finalement revenir sans pouvoir faire leur pèlerinage. Adjara voyage à qui ces personnes se sont confiées auraient eu la promesse de STMB Tour pour l'aider à transporter ses clients jusque sur les lieux saints. Mais comme STMB Tour elle-même avait des difficultés pour amener ses propres pèlerins, Adjara voyage s'est retrouvée coincée. De négociation en négociation, ces pèlerins vont finalement embarquer au bord de Afriquiya, qui les a promenés dans les airs avant de les abandonner à l'aéroport de Tripoli. Ils ont passé trois jours sans logement ni nourriture. C'est l'ambassade du Burkina qui a négocié avec une compagnie pour les ramener au bercail. Qui va les rembourser ? STMB Tour s'en lave les mains. Elle estime qu'elle n'est pas responsable. Et les frais de visas ? "Je ne suis pas responsable de leur mésaventure, donc je ne vois pas pourquoi je dois rembourser ", affirme le DG de STMB Tour. Ces malheureux candidats au Hadj ont regagné leur famille sans espoir d'être remboursés, même pas la somme versée pour obtenir le visa. Ils doivent s'en prendre à eux-mêmes, semble dire le DG de STMB Tour. Il se plaint en effet du "piratage du hadj par d'autres agences". Il estime que lui seul a le droit d'inscrire des pèlerins. Mais les autres agences rétorquent qu'on ne peut pas les empêcher de faire leur travail qui est d'aider leurs clients, de les accompagner. Ce n'est pas parce que c'est le pèlerinage qu'elles doivent faire moins pour leurs clients. De toute façon, même s'il y a " piratage", c'est avec la complicité de STMB Tour qui accepte vendre les visas. En clair, pour les patrons de ces agences, c'est le DG de STMB Tour lui-même qui est à l'origine de ce qu'il dénonce. Mais en vérité, ils estiment qu'il ne s'agit nullement d'un piratage. Ils n'ont fait que leur boulot, aider leurs clients dans leur voyage. C'est la mission traditionnelle des agences de voyage. La loi burkinabè ne l'interdit pas. Le communiqué du MATD sur les conditions à remplir pour organiser Hadj ne peut supplanter la loi, selon le patron de Lanko voyage, Ibrahima Koné. Lui et ses collègues appellent le ministère à revoir l'organisation en faisant jouer vraiment la concurrence. IB



20/01/2010
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